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Collage de Jean Cocteau sur une enveloppe à en-tête du Mercure de France, qui devait éditer le livre en 1914. Les Eugènes, microbes de l’âme, apportent malaise et inquiétude dans les vies trop installées, mais leur action est nécessaire pour vivre des mues. Dans ce projet sans doute promotionnel, la couleur les rend presque désirables.

Ce livre marque une étape décisive dans le rapport de Cocteau à la littérature et à l’art : il y a un avant et un après. Avant : des recueils de poèmes, des nouvelles, des pièces inédites, des activités de presse, mais une perception frivole de la condition de l’artiste et de sa vocation, organisée dans la continuité d’une vie mondaine pleine d’un « besoin de gloire, de contagions et d’épidémies » (« Prospectus »). Après : une découverte des exigences de l’art, une plongée dans les profondeurs.
À sa manière hirsute, dispersée, contradictoire, inachevée, Le Potomak met en scène ce passage (beaucoup moins radical dans les faits que sa mise en scène ne le laisse entendre). C’est pourquoi Cocteau lui donne le statut d’une préface. « Une préface à quoi ? », se demande-t-il. À ce qu’il va devenir au sortir de cette mue et qu’il ne connaît pas encore. Aux œuvres qu’il va créer, aux livres qu’il va écrire… dont certains, paradoxe des aléas de la publication, ont paru avant cette « préface », comme Le Cap de Bonne-Espérance, Le Coq et l’Arlequin et L’Ode à Picasso.