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Traces du groupe des Six après Le Coq et l’Arlequin (1918) : disque Columbia, programmes des concerts de 1928 et 1929, exposition de 1951, article dans Les Cahiers du disque, n° 8, 1954. Voix : Cocteau présente le groupe des Six en 1953.

Inspiré par Erik Satie, Cocteau publie en 1918 Le Coq et l’Arlequin, sorte de manifeste musical contre le debussysme et le wagnérisme. En 1919, il tient pendant cinq mois une chronique dans Paris-Midi, « Carte Blanche », où il présente à plusieurs reprises les concerts des jeunes compositeurs. Il se fait alors le porte-parole de la Jeune Musique.
Le critique musical Henri Collet contribuera à imposer l’appellation du groupe des Six dans deux articles parus dans Comœdia : « Un ouvrage de Rimsky et un ouvrage de Cocteau : Les Cinq Russes, les Six Français et Erik Satie » (16 janvier 1920) et « Les Six français » (23 janvier 1920).

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« Samedi 5 eut lieu dans l’atelier plein [salle Huyghens], le premier concert du groupe, donné par Delgrange, depuis l’armistice.
Peu à peu, la musique se dépouille, se dégage du flou et du rare. Les dissonances précieuses, les surcharges s’effritent […] Pierre Bertin rend service avec brio, mais c’est un comédien qui chante. […] Félicitons-le pour avoir fait bisser La Fête du Duc de Georges Auric qu’il jette joyeusement sur quelques mesures du petit orchestre, brillantes comme un saut périlleux de clown, et d’avoir imposé au public trop friand d’ouvrages brefs, la belle suite de Louis Durey, sur Les Images à Crusoé de Saint Léger-Léger.
Les petites pièces de Honegger furent écrites pour “La musique d’ameublement” inventée par Satie […].
Le solide quatuor à cordes de Milhaud […] dédaigne le pittoresque et son second mouvement “Funèbre” émeut beaucoup. Germaine Tailleferre nous promet une Marie Laurencin pour l’oreille. Viñes-aux-mains-de fée joua les Mouvements perpétuels de Francis Poulenc. Les mouvements perpétuels annoncent un retour à une forme naïve (sans enfantillage ni pastiche) et sa Sonate pour deux clarinettes est ingénieuse comme un gros pigeon mécanique. »
(Jean Cocteau, « Carte Blanche », article du 14 avril 1919.)

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« Les “Six”
En ce moment, mes amis les “Six” ont une bien mauvaise presse. Mon jeune ami Honegger, seul, trouve quelque indulgence devant l’opinion des musicographes, des calligraphes et autres graphologues — communément appelés Critiques.
On lui concède du talent, beaucoup de talent ; et il en aurait davantage — bien entendu — s’il se retirait des “Six” dont il est l’unique et précieuse parure.
Ceci est l’avis désintéressé des bons messieurs musicographes, calligraphes et autres graphologues — de bonnes gens, ai-je toujours dit.
Pour mon compte, je suis très heureux du succès de mon excellent ami Honegger ; car, si j’ai bonne mémoire, c’est au groupe des “Nouveaux-Jeunes” — groupe créé par moi en 1917 — qu’il fit ses débuts comme compositeur. […]
Le groupe des “Nouveaux-Jeunes”, à la suite de ma démission, devint le groupe des “Six”. Je restai en bons rapports avec mes jeunes amis ; même, ils me gardèrent comme “fétiche” — amicale gentillesse, sans plus. […]
Les “Six”, à n’en pas douter, sont dangereux — ou le paraissent. Oui.
Il est honteux qu’ils aient du succès — autant de succès. »
(Erik Satie, « Les Six », Les Feuilles libres, n° 25, février 1922, p. 42-45.)