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Couvertures des traductions de Portraits-Souvenir en japonais par Daigaku Horiguchi (1936), en anglais par Margaret Crosland (1956), en américain par Jesse Browner (1990), en espagnol par Carolina Rosès Delclos (1990), en italien par Mireille Revol-Cappelletti (1993).

Portraits-Souvenir, « souvenirs en surface » de la Belle Époque

« Il me semble impossible d’écrire des Mémoires », annonce Cocteau au tout début de ces Portraits-Souvenir d’abord parus dans Le Figaro du samedi, du 19 janvier au 14 mai 1935, avec de nombreux dessins. Plutôt que de livrer ses mémoires, il se propose donc de « jouer au jeu de massacre à l’envers », en visant de telle sorte dans la nuit confuse de sa mémoire qu’une silhouette, une figure « surgisse de l’ombre apportant, accrochés autour d’elle, certains lieux, certaines circonstances ». Ce qui est aussi, dans son cas, le moyen de rester exact, c’est-à-dire de faire du journalisme en poète, puisque, précise-t-il au début du premier article, « la poésie est exactitude ».

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1934-1935 : Cocteau a le sentiment qu’une époque est révolue, qu’un nouvel âge commence (« Un rideau tombe, un rideau se lève ») et que ce moment d’entre-deux est propice à regarder vers le passé.
Dans Portraits-Souvenir, il plonge donc dans le monde de son enfance et de ses premières expériences dans le milieu littéraire et artistique d’avant 1914, dans ce monde de la Belle Époque dont il a commencé à s’éloigner après la crise de 1913 évoquée dans Le Potomak (1919) et qui précède celle, « entre 1914 et 1924 », où la France a offert « le spectacle d’une incroyable révolution des lettres ».
Anecdotes, portraits des parents et des amis d’enfance, souvenirs des premiers spectacles, des premiers émois. Brillante revue des artistes, ceux que le jeune homme admira et qui guidèrent ses débuts : Réjane, Max, Sarah Bernhardt, Colette, Sem, Mistinguett, les Daudet, les Rostand, etc. Les « souvenirs en surface » qu’il égrène sans programme s’attachent à ressusciter de préférence des silhouettes de « grand format », « étoiles de Paris », « monstres sacrés (lieux ou personnes) », montrées sous « des éclairages révélateurs ».