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Thomas de Castelnau surgit d’abord dans un écho du périodique Le Mot en 1915 (n° 17, 1er mai), intitulé « Il y a ». Son : extrait de l’émission « Démarche du poète : une heure chez Jean Cocteau », France 3 national, dimanche 26 mai 1963.

De l’arrière au front, l’aventure conduit Thomas, après diverses péripéties, sur le front belge, à Coxyde-Bains, où un bataillon de fusiliers marins l’adopte. Ses chefs « étaient des héros charmants », des « âmes nobles », dont le devoir « semblait être celui de madame de Bormes : s’ennuyer le moins possible » et qui « jouaient à se battre sans la moindre haine ».
Alors que Le Grand Écart plonge le cœur pur du roman, Jacques Forestier, dans « l’eau sale » d’une intrigue et d’un milieu vulgaires, Thomas l’imposteur convie le lecteur à rejoindre son héros rêveur dans une petite société, très stendhalienne, de happy few réunis par leur égale noblesse de cœur : « C’était une aristocratie, c’est-à-dire une démocratie profonde, une famille, que ce bataillon. »
Avec eux, Thomas vit des jours de pur bonheur. Sa mort en est l’apothéose. Une balle le frappe en pleine poitrine alors que, sans être soldat, il a convaincu le capitaine Roy de lui laisser porter un pli urgent à un poste voisin :
« Une balle, se dit-il. Je suis perdu si je ne fais pas semblant d’être mort.
Mais en lui, la fiction et la réalité ne formaient qu’un.
Guillaume Thomas était mort. »

*

Guillaume Thomas ne fait pas toute l’histoire, car dans le désordre de la guerre et ses atrocités, il y a place pour faire rêver, mais aussi pour faire rire. Avant de faire son portrait, le début du livre développe celui de deux autres personnages importants pour le mélange des genres que l’auteur aime pratiquer, dans la tradition romantique et shakespearienne : la princesse de Bormes et madame Valiche.
« Quelle loi mystérieuse rassemble un Guillaume, une madame Valiche, une princesse de Bormes comme le vif-argent ? » Ces trois personnages dont la réunion est hautement invraisemblable, ont un point commun : « Leur esprit d’aventure accourt se rejoindre du bout du monde. »
« Née sous le signe des aventures », « caractère haut en relief et en couleur », Clémence de Bormes est « la pureté et la noblesse même ». Mais elle vit pour s’amuser (« Elle voulait s’amuser et savait s’amuser ») ; motif qui la dirige pour prendre en main la maison de santé du docteur Verne, puis pour prendre part aux événements de la guerre, en formant un convoi d’ambulances destiné à rapatrier des blessés du front.
Mme Valiche, qui offre ses services comme infirmière-major, « était aussi laide, vulgaire et rapace que madame de Bormes était belle, noble et désintéressée », avec en plus « un goût maladif pour l’atroce ». « Ces deux femmes se rencontraient sur le terrain de l’intrigue. Simplement, l’une intriguait pour son plaisir, l’autre pour son intérêt. »