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Couverture et frontispice de la nouvelle édition de 1959 chez Stock. Un des trois exemplaires sur Japon bleu Barjon tirés en sus et hors-commerce. Voix : deux poèmes de « Musée secret » dits par l’auteur (disque La Voix de son Maître).

L’enfantillage de Cocteau dans Opéra n’est pas frivole : la mort, le crime, le sang, le danger, l’épouvante, sont aussi présents, en particulier dans la section Musée secret, cœur du recueil. Le Buste, Le Théâtre grec, Nuit blanche ou Pigeon terreur, Découverte des pattes du sphinx en 1926, À l’ancre bleue, Martingale et No man’s land : ces sept poèmes en prose de la section ne parlent que de crimes et de malheurs dans lesquels des victimes sont piégées. Les opera des anges sont aussi des basses œuvres.

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Empruntée à un roman policier d’Émile Gaboriau lu par Cocteau en 1924, l’épigraphe du livre nous renseigne sur la démarche du poète : comme M. Lecoq, agent de police, immédiatement mis sur la piste en voyant des taches de sang, « le coq » français, Cocteau, fait parler les indices laissés par les coupables et se lance à leur poursuite.
De nombreux poèmes en fait respirent cette atmosphère de « gendarmes et voleurs », les voleurs étant des anges taquins, piailleurs quand ils sont piégés mais pas sans ressources (Ange tirant la langue), batailleurs et voleurs comme des pies (Les Alliances), parfois déguisés en statues qu’on épie (Le Détective) ou qui descendent au bal danser (Souvenir des souvenirs).

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Quant aux pièges tragiques du Musée secret, posés par une statue romaine, le théâtre grec, un pigeon mécanique, ou encore le sphinx, ils sont décrits sur un ton tranquille et paisible, sans émotion apparente devant le saugrenu de la chose. Un ton de détective habitué aux faits divers les plus surprenants.
La diction adoptée par Cocteau en 1929 pour les disques Columbia durcit ce ton tranquille dans Le Buste et Nuit blanche ou Pigeon terreur, lus d’une voix brève, dure, scandée, tranchante comme un couperet à la chute des poèmes.
Elle reste dans la note d’une gazette du crime pour les « cocasseries tragiques » du poème À l’ancre bleue.