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Ce poème de six cents vers est publié en 1945 à 475 exemplaires par Gallimard, avec deux lithographies de l’auteur. Pour que la muse s’éveille (frontispice), il faut que le poète « dorme debout » (début du poème). Elle s’endort quand il se réveille (dessin final).

Dans ce poème écrit entre 1942 et 1944, sous l’Occupation, « la muse Léone » aux pattes de lionne « vogue dans ce No man’s land auquel donnera forme le film Orphée. Sur ses traces, le poète voudrait s’enfermer dans son propre imaginaire » (David Gullentops, notice des Œuvres poétiques complètes en Pléiade).
Léone, Le Chiffre Sept (1952), plus tard Le Requiem (1962) : l’univers des longs poèmes de Cocteau après 1940 est par prédilection celui des zones limites de l’envers et de l’endroit du monde, telles qu’un dormeur éveillé peut les percevoir. L’esthétique de la surprise appliquée à la réalité la plus banale, très présente dans les recueils d’avant-guerre, s’efface derrière une préoccupation accrue du clair-obscur, de l’hermétisme imposé par les décalques de l’invisible et qui fait le tragique de la condition du médium.
Paradoxalement, en recourant à ce mélange de monologue intérieur et d’écriture automatique qu’est l’expiration d’un poème long « selon les méthodes du demi-sommeil » (préface au Chiffre Sept, 1953), Cocteau semble retrouver instinctivement les « mécanismes » de l’artisanat poétique. Dans Léone en 1945, dans Le Chiffre Sept en 1952, l’alexandrin classique, césuré à l’hémistiche règne en maître. L’alexandrin romantique est rarissime, les vers sont presque tous concordants (peu d’enjambements). L’allégement même de la ponctuation dans Léone, non virgulé à une exception près, n’a de ce fait presque aucune incidence. Les trois poèmes cités sont aussi parmi les plus disciplinés de toute sa production poétique.