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Les Lettres françaises : un des nombreux numéros comportant un dessin, un texte ou des propos rapportés de Jean Cocteau, ici sur son travail de décorateur à Villefranche et Menton (n° 649, 13-19 décembre 1956).

Inquiété à la Libération par le Comité de libération du cinéma français (28 novembre 1944), puis par le comité d’épuration du Comité national des écrivains, Cocteau est à chaque fois acquitté, avec le soutien d’Éluard et Aragon, communistes et résistants, dont l’influence s’avère décisive dans le processus de l’épuration littéraire.
Tout en persistant dans son refus de mêler la politique et les lettres, Cocteau n’oubliera pas la dette contractée dans ces circonstances vis-à-vis de ses amis et du parti communiste, et sa signature se retrouve très fréquemment après la guerre dans Les Lettres françaises, l’hebdomadaire littéraire du P.C.F., notamment après qu’Aragon en prend la direction en 1953.

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C’est aussi à la demande d’Aragon et en souvenir de son attitude à la Libération que Cocteau participe régulièrement à la vente du C.N.E. au Vél’ d’Hiv’ (Paris). Ce qui ne l’empêche pas de noter, à l’occasion de la vente de 1952, que sauf lui « et cinq ou six autres noms, il n’y a que des écrivains communistes » (Le Passé défini, 24 octobre 1952), ni de s’étonner en 1957, quand Aragon le supplie d’en être cette année encore « comme si son existence dépendant de mon accord ou de mon refus » :
« N’est-il pas étrange, après dix-sept années de brouille et d’insultes à mon adresse, que Louis Aragon m’estime être la seule personne au monde capable de consolider le prestige d’une œuvre (le Comité national des écrivains) dont, à la Libération, j’étais la bête noire, indigne d’y mettre les pieds. Le communisme a-t-il donc un tel besoin de personnalités étrangères au parti et de figures dont la liberté se dessine en relief sur une grisaille ? »
(Le Passé défini, 2 septembre 1957.)

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De son côté en effet, écrit Claude Arnaud, « impatient de changer en compagnon de route les artistes qu’il avait sauvés de l’épuration, le Parti communiste l’entourait depuis de ses soins attentifs. Le Comité central l’ayant situé, dans le sillage de Picasso, du côté de la vraie France, [Cocteau] n’hésita pas à signer en 1949 une pétition en faveur d’Aragon, à qui l’on venait de retirer sa carte d’électeur — son journal, Ce Soir, avait été accusé de diffuser de fausses nouvelles. On le vit même au coude à coude avec Maurice Thorez, “le premier stalinien de France”, lors des vernissages du Malaguène [Picasso] » (Jean Cocteau, Gallimard, Paris, 2003).