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Article de Cocteau publié dans Vogue en mai 1934 : l’auteur explique pourquoi Jocaste, personnage tragique, doit parler dans sa pièce « avec l’accent réservé aux pièces comiques ». Dédicace d’un exemplaire d’Opéra à Elvire Popesco, d’abord pressentie pour le rôle.

Le spectateur de La Machine infernale entend la reine Jocaste avant de la voir : elle se chamaille avec le devin Tirésias qui l’accompagne dans une escapade nocturne jusqu’aux remparts de la ville, en quête du soldat qui prétend avoir vu le fantôme de son mari Laïus (acte I, « Le fantôme »). Cette voix, l’auteur la veut très typée, comme l’indique la première didascalie : « Elle a un accent très fort : cet accent international des royalties. » Avant de confier le rôle à Marthe Régnier, Cocteau avait dans ce but espéré convaincre Elvire Popesco, dont l’accent roumain et le jeu excessif lui semblaient parfaitement appropriés. Il s’explique sur ce choix de diction dans l’article publié dans Vogue en mai 1934 :
« On se demandera, je suppose, pourquoi j’oblige Madame Marthe Régnier à faire ses débuts de tragédienne avec l’accent réservé aux pièces comiques et pourquoi Jocaste s’exprime par l’entremise de cet accent. Je répondrais que Jocaste “devait” parler avec un accent, que je ne me sentais pas libre de le lui donner ou de le lui ôter à ma guise, et que le caractère de la reine relèverait de cette façon de prononcer les paroles. Nécessité instinctive et comme animale où je me trouvai de mettre Jocaste sous le signe de cet accent ; accent des personnes royales, gouvernant sous un autre ciel que celui où elles sont nées, accent qui les dépayse, qui donne de la drôlerie à leurs colères et une force étrange à leur tendresse. »