L'auteur et son œuvre / Singularités

Romans policiers

De l’usage du polar

« Voilà ce que j’aime le soir. Un bon livre policier ou d’espionnage et lutter un peu contre le sommeil. Tout à coup je me retrouve avec une phrase qui n’est pas écrite. Et la grande tentation du poème fleuve me saisit » (Jean Cocteau, Le Passé défini, janvier 1959.)

Le fonds de Montpellier possède un lot de romans policiers, pour la plupart légués par Édouard Dermit, sur lesquels Cocteau écrivait des notes. Il lui arrivait parfois d’ébaucher un dessin sur une page de faux-titre, un poème autour d’un « achevé d’imprimer » ou encore le plan d’un courrier entre deux chapitres de roman. On trouve ainsi la genèse en style abrégé d’un discours à la reine de Belgique dans Les Étoiles s’éteignent d’André Lay (1956), une réflexion sur l’art dans Cœur de hareng de Pierre Vial-Lesou (1958), livre qui raconte une histoire de proxénète, ou un texte poétique commençant par « Je voudrais vous prendre par la main et vous conduire dans un monde moins lourd et moins rébarbatif que le nôtre » dans Le Bluffeur de James Mallahan Cain (1958).
D’autres ouvrages du même genre comportent une dédicace au grand lecteur de polar qu’a été Cocteau, d’autres encore ont reçu le privilège d’une préface de sa main ou bien affichent en exergue l’hommage que leur auteur souhaitait rendre à l’ami, au complice, et même à l’admirateur.
Sur ces pages inédites, l’écriture de Cocteau reste parfois à déchiffrer : ses notes peuvent n’être que des brouillons de type « pense-bête », elles peuvent aussi montrer le premier jet d’un texte célèbre que l’on saura reconnaître, ou encore receler quelque perle oubliée par l’auteur lui-même.

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« Voilà ce que j’aime le soir. Un bon livre policier ou d’espionnage et lutter un peu contre le sommeil. Tout à coup je me retrouve avec une phrase qui n’est pas écrite. Et la grande tentation du poème fleuve me saisit. Je lâche mon livre, empoigne le bloc, le stylo pointe… pour m’apercevoir que c’est une fausse alerte et que le seigneur qui donne les ordres est profondément endormi. »
(Jean Cocteau, Le Passé défini, janvier 1959.)