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« La petite fille du rêve » (Ce soir, 19 avril 1938). Comme deux autres (« Les disques de Parade » et « Présentation d’Al Brown au public du cinéma Montparnasse le soir du 31 décembre »), l’article est bizarrement daté de 1946 dans Le Foyer des artistes.

Née le 25 octobre 1923, Maria Belita Jepson-Turner, dite Belita, reçoit une formation de danseuse dans la troupe des Ballets russes, où elle est brièvement la partenaire d’Anton Dolin. Elle patine dès l’âge de douze ans aux Jeux olympiques de 1936, sous les couleurs de la Grande-Bretagne. La grâce avec laquelle elle évolue sur la glace surprend le public. Le cinéma hollywoodien essaie de l’enrôler, mais en vain : Belita préfère d’autres types de films, particulièrement ceux dans lesquels elle peut jouer les vamps. Après un mariage en 1946 (qui s’avère malheureux), elle ne patine plus sauf dans Invitation à la danse, un rôle créé pour elle par Gene Kelly. Belita arrête sa carrière en 1959, se retire dans l’Aveyron où elle meurt le 18 décembre 2005. Elle a joué dans des films, dont Suspense (1946) et Never Let Me Go (1953), avec Clark Gable.

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En avril 1938, Belita va vers ses quinze ans : pour Cocteau, elle est encore une « petite fille ». Il la voit comme une réincarnation d’Alice, qui sait jouer avec le monde du rêve et déjouer les pièges qu’il tend, malgré sa jeunesse : « Elle n’interprète ni la danse ni les vocalises d’un musicien, elle invente sa propre musique, sa musique de silence, et lorsqu’elle se sauve de cette invisibilité qui l’emporte et l’entraîne sur place vers l’inhumain, on dirait une plume de cygne qui boucle un chef-d’œuvre par le paraphe inimitable d’un nom célèbre. Petite fille du rêve. » « C’est le fantôme de Mozart », écrit Cocteau plus loin, avant de réinscrire l’allusion au Lac des cygnes dans un calembour léger : « Petite fille du rêve ! C’est le nom qu’elle signe d’une plume de cygne. » Une phrase, en italique dans l’article, rend à cette jeune Belita tout ce qui émane d’elle : « Elle s’exprime. »