L'auteur et son œuvre / Singularités

Conversation

Le désir de convaincre

Illustrations de Jean Cocteau pour la réédition d’Opéra en 1952 (Arcanes, Paris).

Si la conversation de Cocteau éblouit et charme, elle n’en est pas moins sous-tendue, comme tous ses livres, par une ligne « de chocs et de risques », une « ligne de combat », reconnaît-il dans La Difficulté d’être (1947). Autant que le sport amical de la conversation à la Montaigne, Cocteau pratique le plaidoyer à la Rousseau, par un besoin viscéral de se sentir aimé et justifié dans ce qu’il est.
« Il voulait qu’on l’admirât », écrit Bernard Faÿ, qui le fréquente dès les années 1910 dans l’entourage du comte Étienne de Beaumont, « mais il tenait encore plus à se sentir aimé ; il s’agissait là pour lui d’un besoin physique autant que moral. S’il frémissait devant la moindre critique littéraire, cela ne tenait pas à une vanité d’écrivain, mais à cette sensibilité avide, qui ne se résignait pas à perdre un ami, à barrer un nom sur son livre, ou dans son cœur. » (Les Précieux, Librairie académique Perrin, Paris, 1966).
À la fin des années cinquante, Sartre présente comme bien connu de tous « ses airs traqués, ses monologues sur le destin, sur le temps, sur la vie, morceaux choisis d’une apologie perpétuelle et suppliante […] » (préface au Traître d’André Gorz, Seuil, Paris, 1958).