L'auteur et son œuvre / Vie de l'œuvre

Lectures de l’œuvre

Textes-prétextes

Arletty en 1936, dans L’École des veuves à l’A.B.C., music-hall parisien. C’est à sa demande que Jean Cocteau écrit cette « farce de tréteau, sauvée par son seul mouvement », donnée entre un tour de chant et le jeu des Pas Possible. Voix : « Je l’ai perdue », monologue du Théâtre de poche dit par Jean Cocteau en 1960 sur une musique de Georges Auric.

Cocteau est ce qu’il appelle un « dramaturge acteur » dans son essai sur Jean Marais (1951), autrement dit un auteur qui aime écrire des textes « dans la voix » de comédiens ou artistes qu’il a en vue en écrivant ces textes. Un certain nombre de ces « textes-prétextes » sont réunis dans Théâtre de poche en 1949, comme les chansons parlées pour Marianne Oswald ou des pièces en un acte pour Édith Piaf ou Arletty. D’autres ont été repris en Pléiade comme L’Impromptu d’Alice (1937), écrits pour Alice Cocéa. Certains sont perdus, comme un Impromptu pour la radio écrit pour Edwige Feuillère en 1943.
Mais quelques pièces plus ambitieuses sont aussi conçues selon ce principe : Les Monstres sacrés en 1940 (pour Yvonne de Bray) et surtout, dans les années vingt, Orphée et La Voix humaine, deux courtes pièces d’abord écrites « dans la voix de Mme Pitoëff », confie Cocteau au Phare de Villefranche (9 janvier 1926), en se réclamant de Racine et Molière : « Dans Orphée, toute l’importance est dans le texte. La mise en scène doit passer au second plan. J’ai même repris la tradition de Racine, de Molière, qui écrivaient pour une tragédienne et j’ai écrit le rôle d’Orphée dans la voix de Mme Pitoëff ».

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Cela n’empêche pas Cocteau de confier ces textes-prétextes à d’autres comédiens, voire de les reprendre lui-même, comme le monologue « Je l’ai perdue », auquel il prête sa voix dans un « essai radiophonique » conçu et réalisé par Maritie et Gilbert Carpentier et présenté au concours du prix Italia 1960 par Radio-Luxembourg, Cherchez Eurydice. Quatre interprétations s’y succèdent, sur des musiques originales différentes : François Périer, musique de Pierre Sancan ; Jean-Paul Belmondo, musique de Martial Solal ; André Maurice, musique de Michel Magne, Jean Cocteau, musique de Georges Auric.